Des lentilles aux pruneaux

Récit de notre étape du Puy-en-Velay à Agen (26.6. au 1.7.2016)

Nos jambes sont encore en peu engourdies quand nous quittons notre hôtel au centre du Puy le dimanche matin, après un jour de repos. Le Puy est entouré de collines, et ça veut dire qu’on commence la journée tout de suite avec une montée, et celle que notre application GPS a choisi pour nous est très raide. Tellement raide qu’à un moment je suis trop lente pour avancer et je tombe ! Heureusement on ne tombe jamais très haut avec un vélo couché… C’est aussi la première poussée pour moi dans ce voyage.

La sortie dure du Puy-en-Velay
La sortie dure du Puy-en-Velay

Nous maîtrisons cette première montée, pour continuer à monter encore, mais c’est moins raide et les routes sont agréables, très calmes, entre les champs. C’est vraiment la France dont nous avons rêvé pour faire du vélo : De petites routes, des champs de blé, des prés, des pâturages. Les routes sont bordées de haies et de fleurs sauvages, paradis pour les insectes, papillons et autres petits animaux. A côté de ça la Suisse est totalement stérile, tout a été coupé, arraché, herbicidé, exterminé, pour que tout soit propre et en ordre et que tout le monde puisse avoir sa petite maison entourée de son petit jardin tout aussi stérile. Je me dis qu’on n’a plus de campagne en Suisse…

Fleurs sauvages en bord de route
Fleurs sauvages en bord de route

Après ce petit interlude râleur, retour à la route. Nous faisons une belle descente jusqu’à un petit village nommé Chapeauroux. Les descentes en vélo couché sont particulièrement jouissives, je dirais même que c’est le plus grand avantage du vélo couché ! Châteauroux est situé un peu dans un trou, donc il faut reprendre une montée. Celle-ci est particulièrement belle, le long d’une rivière, dans un très beau paysage, sur une route tranquille, ça sent bon le sapin et on sent qu’on est encore bien en altitude, aux alentours de 1000m. On s’arrête à Grandrieu, au camping municipal simple et sympa. Juste en-dessous il y a le congrès des vétérans de la guerre d’Algérie. Il y a de la musique, d’abord un chanteur qui chante des chansons françaises, puis ceux qui sont encore là chantent jusqu’à passé 22h…

Le matin suivant nous commençons la journée par une montée à un col de 1400m, suivi d’une petite descente et d’un deuxième col à 1200m. Heureusement il fait assez froid, malgré le grand soleil. Pour la descente j’aurais pu mettre mes gants, le bonnet et la doudoune, et j’aurais tout juste eu chaud. Mais comme j’étais en short j’ai fini avec les jambes complètement congelées…

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On est lundi et apparemment c’est le jour de congé des boulangeries ! Les trois rencontrées en route sont soit fermées, soit ne vendent pas de pain le lundi. Comme on n’a pas grand-chose d’autre à manger on achète une boîte de ravioli qu’on chauffe à un petit endroit sympa protégé du vent dans une forêt. Heureusement qu’on avait un bon fromage de brebis pour l’accompagner ! On le saura pour le futur, et on prévoira notre pain maison.

Les raviolis pour remplacer le pain... à ne pas refaire!
Les raviolis pour remplacer le pain… à ne pas refaire!

Le soir on arrive à Nasbinals, village situé sur le chemin de Saint Jacques. Du coup, il y a deux (!) épiceries, une boulangerie ouverte tous (!) les jours (même le lundi !) et plusieurs gîtes. On décide de passer la nuit au gîte d’étape communal, lieu sympa et propre avec une cuisine. Nous rencontrons quelques randonneurs. La première question est toujours « alors, vous faites le chemin ? » A laquelle nous ne savons pas bien quoi répondre… faisons-nous « le » chemin ? Est-ce qu’il n’y en a qu’un ? Nous faisons certainement notre chemin. Pour le reste, on essaye d’expliquer ce qu’on fait et où on va (ou où on pense aller).

Le jour suivant commence de nouveau avec… une montée à un col ! Cela semble commencer à être une règle… Cette fois c’est le col d’Aubrac à 1340m, puis c’est la grosse descente. Cette fois c’est vraiment du sérieux parce qu’on descend d’un coup jusqu’à 300m d’altitude !

Col d'Aubrac

Une descente de rêve! Les nuages nous attendent en bas.
Une descente de rêve! Les nuages nous attendent en bas.

Le massif central est derrière nous. Par contre il commence vite à nous manquer, car ici en bas il fait bien plus chaud, et il manque le petit air frais de montagne si agréable… Nous enchaînons quelques montées vraiment rudes avec de petites descentes, traversons quelques jolis villages, et arrivons au bout d’une longue descente à Marcillac. Nous nous arrêtons dans un magasin bio pour faire nos courses, et découvrons que le propriétaire est lui-même un grand cyclo-voyageur qui a voyagé à travers le monde pendant plus de 20 ans ! Nous échangeons un peu, puis il nous apprend que le camping municipal où nous comptions passer la nuit est fermé depuis la saison passée, pour des raisons de jeux politiques entre les mairies de deux communes… Il nous conseille de quand même aller voir, et nous indique aussi un endroit pour faire du camping sauvage au cas où. Arrivés au camping, nous découvrons qu’il est toujours là, le camping, avec les emplacements numérotés, l’herbe bien verte, les haies… sauf qu’il semble fermé. On va donc vers la maison des (anciens) gérants, qui se révèlent être des motards très sympas, qui nous racontent encore une fois l’histoire de la fermeture du camping, et qui nous disent qu’il n’y a pas de problème, qu’on peut s’installer « en sauvage » et qu’il y a même encore de l’eau aux emplacements. Nous installons donc notre tente à un endroit discret, et nous voilà avec nous premier camping « presque » sauvage !

Le lendemain, après nos deux heures habituelles qu’il nous faut le matin pour être prêts, la journée commence pour une fois avec une route à plat, jusqu’à la prochaine boulangerie. Avec nos pains au chocolat dans nos sacs nous entamons une montée sur une route pas trop raide, calme et ombragée. Nous sommes récompensés par une place de picnic et un beau panorama sur toute la région. Nous croisons beaucoup de panneaux indiquant des caves, mais nous ne voyons presque aucun vignoble. Mystère ? Miguel a l’idée qu’il pourrait s’agir d’une nouvelle sorte de raisin qui pousse sous la terre…

La suite se fait dans de petites routes de campagne, entre champs et prés. On croise des petits villages, c’est beau mais ils sont tous un peu morts. Pas d’épicerie, pas de boulangerie, pas de café… même pas de ‘tit vieux assis devant une porte en train de regarder la vie qui passe (au même temps il n’y a pas vraiment grand-chose à regarder car rien ne se passe…).

Un des innombrables petits villages que nous avons traversés.
Un des innombrables petits villages que nous avons traversés.

Ce jour-là, quand nous arrivons dans une petite bourgade vers 16h, nous décidons de nous arrêter un peu plus tôt que prévu et d’aller au camping. J’ai besoin de reposer les jambes, et envie de voir un peu de vie autour de nous, donc nous allons manger à la brasserie en vieille ville. Comme d’habitude en France il y a le menu, entrée-plat-dessert pour vraiment pas cher, nous en profitons pour nous remplir les estomacs !

Le lendemain nous recommençons nos routes à travers la campagne ondulée – montées et descentes s’enchaînent. Nous nous rapprochons de nouveau du chemin de St Jacques et nous voyons réapparaître des randonneurs. Le soleil a réapparu et nous sommes contents d’être à vélo, au moins nous pouvons nous reposer un peu dans les descentes. Nous traversons une petite série de villages très pittoresques, avec des maisons de pierre et beaucoup de fleurs, mais pas une âme dans les rues (pas besoin de vous dire qu’il n’y avait pas de boulangerie…). Quelle surprise du coup en arrivant à Vayzac : un petit café-épicerie juste comme il fallait ! On nous sert encore un café au lait avant la fermeture de l’après-midi.

Un petit café bienvenu.
Un petit café bienvenu.

Puis le paysage commence gentiment à s’aplatir. On n’a plus ces montées raides, on n’est plus constamment entourés de collines où on se demande comment on va bien pouvoir les passer. Les arbres aussi changent, ils sont moins hauts et la végétation est moins dense. On voit apparaître des champs de maïs et de tournesols, les cigales chantent dans les arbres. Bref, ça commence à sentir le sud ! Les jambes sont aussi moins fatiguées et on arrive à pédaler jusqu’à vers 19h. Cette fois on termine la journée par une rude montée, pour arriver un camping repéré sur Google Maps. L’effort valait bien la peine, c’est un camping géré par des hollandais. L’herbe est parfaite, les installations sanitaires aussi, et il y a une piscine avec une belle vue.

La piscine en fin de journée, la perfection!
La piscine en fin de journée, la perfection!

Départ tranquille le lendemain, car nous savons que la route vers Agen sera plate. Nous faisons un petit bout sur une départementale assez fréquentée, mais tout le monde nous laisse beaucoup d’espace, surtout les camions. Arrêt à Moissac pour visiter la belle cathédrale (et aller aux toilettes), on zigzague un peu dans la ville pour trouver une épicerie, puis nous rejoignons la véloroute des deux mers, le long du canal latéral de la Garonne.

Devant la cathédrale de Moissac.
Devant la cathédrale de Moissac.

C’est tranquille, c’est plat et ça va tout droit. On commence à croiser un peu plus de cyclovoyageurs – jusqu’à maintenant la plupart de cyclistes rencontrés étaient des lycraphiles… Sur le chemin nous rencontrons des lieux assez originaux : près de Valence d’Agen, l’ancien abattoir a été transformé en lieu d’accueil des cyclistes, avec WC, douches, cuisine, tables et Wifi. Après ça on a un peu de la peine à dire que la Suisse est le paradis des cyclistes !

Véloroute des deux mers. Un peu trop plat, trop droit mais c'est la détente!
Véloroute des deux mers. Un peu trop plat, trop droit mais c’est la détente!

Peu avant Agen, nous dévions de la route pour nous enfoncer dans le dédale de la zone commerciale, destination Décathlon pour faire quelques achats. Puis nous rejoignons la véloroute avec son impressionnant canal passant par le pont, puis arrivons confortablement (assisté par notre application de navigation) chez nos hôtes Warmshowers, où nous retrouvons un lit, une douche, un jardin et un dîner partagé en famille. Et un jour de repos bien mérité dans la capitale des pruneaux !

2 thoughts on “Des lentilles aux pruneaux

  1. Un voyage merveilleux! Et quelle belle description par Eva! Je souhaite que tout continue aussi

    beau ! Baisers. Ruth

  2. Quel joli blog !
    Plaisir de voir votre trip presque en live et de lire vos aventures.
    Bel été et bon coup de pédale!

    Pascal

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