Beaucoup de sable, beaucoup de touristes, et des fruits en self-service

Récit de l’étape de Lisbonne à Quarteira (du 7 au 14.9.2016)

Il est toujours difficile de repartir après une pause. On aurait encore pu faire tant de choses à Lisbonne… ça attendra une prochaine fois. Nous repoussons notre départ d’un jour à cause de la chaleur – 40° la journée et presque 30° la nuit ne nous inspirent pas à pédaler. Mais aujourd’hui c’est reparti. Nous avons fait nos sacoches et remis de l’ordre dans toutes nos affaires éparpillées dans toute la maison. Nous avons pris un dernier petit déjeuner tout confort avec le lait chauffé au micro-ondes, les yogourts frais du frigo et le beurre qui ne coule pas partout. La veille j’ai réglé les freins de mon vélo (au moins aussi bien que j’ai pu, je ne suis pas très douée en freins V-brake…). On a descendu nos vélos dans l’ascenseur, puis mis les bagages dessus. Et commencé à rouler à travers la périphérie de Lisbonne. Et dès qu’on est assis sur le vélo, lourd avec tous ces bagages, on retrouve immédiatement toutes les sensations du voyage, on se retrouve bien sur cet engin qui peut nous transporter aux quatre coins du monde, les petits conforts et luxes de la vie sédentaires sont (presque) oubliés.

Nous sommes en route direction Belém où nous comptons prendre le ferry à travers le Tejo. Les minutes sont comptées, il faut avancer, il y a de la circulation mais pour finir tout se passe bien et nous arrivons 15 minutes avant le départ du ferry. En attendant d’embarquer, un monsieur vient nous parler. Il est en moto mais a fait beaucoup de vélo dans sa vie, aurait même construit ses propres vélos. Il s’intéresse donc à nos vélos couchés. Sur le bateau, pendant que je prends des photos, il continue la conversation avec Miguel, et de la technique du vélo la discussion part vers le système politique portugais et le « c’était mieux avant ».

Nous pédalons le long de la costa de Caparica. Un endroit que nous connaissons bien, mais c’est la première découverte à vélo. Nous ne pouvons pas nous retenir de nous arrêter à la Praia da Mata, notre plage habituelle, pour un bain et un café.

La plage est si agréable, l’eau si bonne, on aurait pu rester ici toute la journée. Mais nous avons envie d’atteindre Setúbal ce soir pour que Miguel puisse se rendre à un rendez-vous à Lisbonne le lendemain. Donc, on continue. A la fin de ces belles plages, un chemin de sable. Nous croisons un groupe de VTT-istes qui nous le déconseillent fortement, ils ont dû pousser. Ils nous conseillent un autre chemin à travers la forêt qui s’avère très bien.

Pour la suite ce sera un bout sur une route principale, un repas bon marché dans un café au bord de la route, et des montées qui s’enchaînent pour arriver à la Serra da Arrábida. Nos efforts sont récompensés par une vue magnifique et une descente rapide vers la mer.

Cette longue journée termine à Setúbal chez Paulo, notre hôte warmshowers qui nous héberge pendant deux nuits.

Après cette journée de repos bien nécessaire, nous repartons attraper un ferry qui nous amène à la péninsule de Tróia, où la seule route nous amène au village de Comporta où nous mangeons un très bon palmier dans une pastelaria. Nous continuons vers le sud, sur une route plate entre les rizières et les pins et des champs pleins de cigognes.

A Melides nous décidons de faire les courses et d’avancer jusqu’au prochain camping. Nous nous arrêtons encore pour acheter des fruits au bord de la route, et nous finissons par manger seulement vers 16h sur la plage de la Lagoa de Santo André, après avoir installé notre tente au camping.

Plus tard, un jeune hollandais à vélo viendra s’installer à côté de notre tente, il va de Faro à Lisbonne avec un vélo qu’il a acheté à Faro pour 50 Euros et un vieux sac à dos. Comme quoi, pas forcément besoin de tout le matériel dernier cri pour voyager à vélo ! A propos de matériel dernier cri, c’est ce soir que nous inaugurons notre nouvelle petite lampe de tente qui s’avère bien utile maintenant que l’été touche à sa fin et que les soirées sont de plus en plus courtes.

Le lendemain nous continuons notre route en direction du sud. Tout d’un coup, un panneau d’interdiction pour vélos (ainsi que pour piétons et tracteurs), et un panneau d’autoroute mais qui est à moitié couvert par du plastique. Il s’avère que cette route aurait dû être transformée en autoroute il y a quelques années déjà, tout est prêt y compris les panneaux, mais elle n’a pas pu être ouverte officiellement comme autoroute. Du coup la voie de gauche est fermée pour les voitures, ce qui en fait une magnifique piste cyclable !

Nous la quittons un peu avant Sines pour suivre l’Eurovélo 1 dont nous avons téléchargé le tracé d’une page internet qui semblait très officielle, avec une description du tracé Eurovélo 1 au Portugal. Oui, c’est le même Eurovélo qui nous avait fait prendre des escaliers à Hendaye, pour ceux qui s’en souviennent… on en reparlera. Pour l’instant nous suivons une route en assez mauvais état mais praticable pour arriver à Sines, ville portuaire où nous faisons picnic dans un parc un peu abandonné. La piste cyclable qui nous aide magnifiquement à traverser la ville termine – dans une sorte de rond-point sans issue ! Encore une de ces pistes cyclables faite pour faire aller-retour depuis sa voiture plutôt que de se déplacer à vélo…

Pour la suite, nous suivons les belles plages sauvages de la Costa Vicentina, où il n’y a pas de bâtiments, à part un café et une école de surf par-ci par-là.

Au village de Porto Covo, nous arrivons au minimarché juste à l’heure de fermeture, mais comme les vendeuses ont vu nos vélos, elles ont envie de parler avec nous et on peut encore faire nos courses. Puis nous avons le choix entre la route (qui fait un grand détour) et l’Eurovélo 1 qui passe par des petits chemins. Nous choisissons la deuxième option, ce sera plus joli et puis, les routes Eurovélo sont faites pour les voyages à vélo, n’est-ce pas ? Erreur fatidique. Alors qu’au début le chemin est bien praticable et joli, nous terminons sur un chemin de sable où il est impossible de pédaler et presque impossible de pousser des vélos chargés comme les nôtres. Faire demi-tour n’est pas une option à ce stade, donc nous continuons en maudissant le type derrière son bureau qui a dessiné le tracé Eurovélo avec son stylo sur une carte et qui n’a sûrement jamais mis son derrière sur un vélo (ou alors seulement sur une de ces fameuses pistes cyclables aller-retour). On repense aux escaliers d’Hendaye et on jure de ne plus jamais faire confiance à Eurovélo ! Au bout d’un moment la seule option est de pousser les vélos sur la végétation des dunes – mea culpa pour avoir marché sur ces plantes qui sont sûrement protégées et tout, mais autrement j’y serais probablement encore…

A droite ou à gauche?
Désolée pour les plantes…

Par ailleurs, ce site internet Eurovélo Portugal où nous avions téléchargés les tracés GPS n’existera déjà plus quelques jours plus tard!

Au bout de ce calvaire nous arrivons quand même sur une belle plage où nous nous baignons entre les surfeurs et mangeons notre picnic. Nous avons encore un petit mauvais moment à passer dans le sable avant d’arriver enfin à la route asphaltée, puis ça roule vite et nous arrivons à Vila Nova de Milfontes où nous nous installons dans un des deux campings (le plus petit des deux). Je comprends trop tard qu’il y a des douches d’eau chaude et des douches d’eau froide (je me demandais bien pourquoi la dame faisait la queue devant les douches…). Donc je me trouve dans une douche d’eau froide, mais la paresse l’emporte et je me contente avec l’eau froide, en fait ce n’était pas si horrible que ça.

Nous nous réveillons dans le brouillard et l’humidité généralisée. Rien ne sèche, ça fait deux jours que je trimballe des slips lavés mais toujours mouillés… Mais au moins ça fait de jolies photos (le brouillard, pas les slips)…

Dès maintenant on boude Eurovélo pour de bon, nous suivons les propositions de notre préféré cycle.travel qui nous amène sur de petites routes entre les champs et les fermes. Nous découvrons ainsi une ferme d’autruches et de lamas, et des gigantesques plantations de fraises et autres petits fruits. Sur la route on croise les travailleurs de ces fermes, d’origine probablement népalaise, et on devine leurs logements misérables attachées à ces fermes. Voilà d’où viennent les fraises et framboises de nos supermarchés… Et voici un article du NY Times que j’ai trouvé intéressant à ce sujet.

Cultivations de fraises à perte de vue

Nous arrivons à Odeceixe en milieu d’après-midi, et juste après avoir traversé la rivière Seixe qui marque le début de l’Algarve. Nous choisissons une pension avec de bonnes commentaires sur Tripadvisor, et nous voilà accueillis par Cláudio, le propriétaire sympathique et énergique. Pour finir la chambre sera d’une qualité très moyenne, mais le petit-déjeuner sera exceptionnel pour le Portugal, avec peu de choix mais uniquement des produits régionaux et frais, et du vrai jus d’orange à volonté (je dirais que 99% des hôtels au Portugal, même les plus chers, servent une sorte de breuvage sucré-chimique-coloré qui n’a plus grand-chose à voir avec du jus d’orange).

En attendant que notre chambre soit prête nous pédalons encore quelques kilomètres jusqu’à la plage d’Odeceixe, mais un brouillard épais cache la mer et le drapeau rouge est hissé, donc pas de bain aujourd’hui. Nous trouvons qu’il y a déjà pas mal de touristes à Odeceixe, mais les gens décrivent ce village comme encore authentique et tranquille… nous allons comprendre pourquoi dans quelques jours, sur la côte sud de l’Algarve.

Le lendemain matin nous commençons par monter tout en haut du village, sur une route pavée et raide qui m’oblige à pousser le vélo. Ça me met toujours de mauvais poil de commencer la journée par une poussée, alors je ne profite pas pleinement de la belle vue depuis le moulin en haut…

Mais la suite s’avère meilleure, une route de campagne tranquille par des coins qui semblent oubliés du monde, des arbres fruitiers qui poussent sur le bord de la route et nous pouvons cueillir des pommes et des pêches.

A Aljezur nous croisons plus de touristes, surtout allemands et hollandais. Nous devons demander le chemin pour la prochaine boulangerie en allemand… Un petit tour dans cette ville aux maisons blanches et au ciel bleu, puis c’est reparti sur une route au milieu de nulle part, dans un paysage de collines brun-jaunes et un parc éolien. Nous atteignons Vila do Bispo l’estomac vide et sommes contents de trouver des tables de picnic devant la mairie. Ensuite nous repartons atteindre le point le plus au sud-ouest de l’Europe, le Cabo de São Vicente, que nous atteignons facilement grâce à une route toute droite vent dans le dos.

Au Cabo nous ne nous trouvons plus au milieu de nulle part, mais au milieu de touristes avec leurs selfie-sticks et l’infrastructure pour contenter leurs estomacs.

Très belle vue, mais difficile à prendre en photo sans autres touristes!

C’est donc assez difficile de trouver un endroit un peu calme pour prendre notre photo “selfie” (sans le stick), mais nous réussissons après avoir chassé deux motards polonais qui voulaient prendre une photo exactement au même endroit que nous avec leurs motos.

Nous passons la nuit à Sagres dans une chambre déniché sur Air B’n’B, sympathique mais humide comme partout dans ce pays, je trimballerai des slips humides encore un peu plus longtemps…

A partir de Sagres, nous avons une « Ecovia » marqué sur le GPS, une route à vélo qui conduit le long de la côte atlantique sud. Les premiers essais sont concluants. Elle évite la route nationale 125 (très fréquentée) et nous amène sur de petites routes parfois asphaltées et parfois non, mais toujours praticables.

On a déjà eu pire…
Heureusement qu’on a fait cette pente à la descente!

Les villages deviennent de plus en plus touristiques. Nous faisons halte dans un village où nous n’avons quasiment pas vu de portugais dans la rue, et où les vieux qu’on voit habituellement sur la place du village à observer la vie qui passe sont remplacés par des couples de touristes allemands du même âge. Les courses au minimarché pour notre piquenique coûtent aussi beaucoup plus chers que d’habitude… Et nous faisons notre piquenique entre des anglais en surpoids qui mangent des glaces.

Envie de venir passer vos vacances là?

En dehors de ces villages, ce sont les quintas transformées en logements de vacances et autres golf resorts. Ça me déprime, et quand le moral est bas c’est plus difficile à pédaler et nous arrivons fatigués à Alvor. Le camping est organisé comme un camp de l’armée, on doit porter un bracelet d’identification et laisser une caution. En plus il y a plein d’oiseaux qui nous font caca sur la tente… et un voisin qui ronfle, ça faisait longtemps.

Le lendemain nous laissons l’Ecovia un peu de côté pour aller visiter Silves. Après la sortie d’Alvor et la traversée de Portimão nous rejoignons vite de petites routes d’où on voit des salines, et de petits chemins difficiles à passer à vélo mais entourés d’une belle végétation, de jardins et de plantations d’orangers. Nous faisons halte à côté d’un magnifique figuier et mangeons des figues pour notre deuxième petit déjeuner. Je suis un peu réconciliée avec l’Algarve !

Belle vue sur Silves

A Silves nous montons à l’ancienne forteresse d’où nous avons une belle vue.

Et pendant ce temps, nos vélos nous attendent.

Nous décidons de manger au café là-bas – la carte n’avait pas l’air trop mal. On a fini par payer 24 Euros pour deux boissons et deux plats qui nous apportaient environ 100 kcal chacun (le mien était composé à 90% de feuilles de salade). Ce repas suffit à peine pour la montée à la sortie de Silves. On arrive à faire encore un peu de route jusqu’au prochain grand village (Algoz) où nous nous jetons sur le premier café pour ingurgiter 2 cafés au lait, 1 coca, 2 empadas et 2 tranches de gâteau pour moins d’un tiers du prix de notre déjeuner « light ». Avec ces calories dans le ventre nous arrivons à faire le reste du trajet de ce jour, d’abord à travers la campagne avec ses chênes, puis par un de ces villages composés uniquement de résidences touristiques et pour finir par un chemin de vélo qui nous permet de rejoindre Quarteira, petite ville au bord de la mer. Ponctuels comme des horloges suisses nous arrivons à 18 heures devant la maison de tío Alvaro et tía Odília qui nous accueillent chez eux et nous nourriront aux plats typiques de la région pendant 3 jours.

La plage de Quarteira, en fin de saison.

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